Hier, le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, a annoncé que la mortalité routière avait progressé de 3,7 % en 2014 par rapport à 2013 (soit 120 décès de plus) justifiant ainsi la mise en œuvre d’un plan de 26 nouvelles mesures pour enrayer cette hausse. Pour votre, il s’agit là encore d’un résumé un peu court entre les chiffres et leurs effets.

« Aujourd’hui on nous résume la sécurité routière en deux chiffres et une phrase. Presque autant que le nombre de caractères d’un tweet. Mais il faut regarder la réalité au fond. L’annonce de la hausse de la mortalité sur nos routes pourrait laisser à penser que les conducteurs se relâchent. Ce n’est pas exact, mais c’est pourtant ce qui justifie pour le gouvernement de nouvelles mesures répressives » explique Franck MARLIN.

« Comme le souligne pertinemment l’association "40 millions d’automobilistes", cette hausse n’est pas équilibrée. Ainsi, la Bretagne voit par exemple sa mortalité routière augmenter de 14 %, l’Alsace de plus de 41 %. À elles seules, ces deux régions portent près de 40 % du poids de l’augmentation de la mortalité routière nationale… Par ailleurs, cette progression de 3,7 % s’explique par une hausse sensible de la mortalité routière des usagers les plus vulnérables : les piétons (+ 8 %), les cyclistes (+ 8 %) et les cyclomotoristes (+ 6 %). Tout cela relativise donc la portée des nouvelles mesures qui viennent d’être annoncées !

« Si réduire le seuil du taux d’alcoolémie pour les jeunes conducteurs de 0,5 à 0,2 grammes par litre de sang (soit moins d’un verre d’alcool) peut sembler être une chose, on ne peut toutefois que s’interroger sur la maintien d’un taux au-dessus de zéro. Ou la conduite sous emprise d’alcool est dangereuse et dans ce cas il faut arrêter de tergiverser, ou bien elle ne l’est pas. Il faut sortir de l’hypocrisie. Fixer le seuil à 0,2 c’est de surcroit tendre un piège aux jeunes qui prendront le volant en n’ayant consommé qu’un seul verre d’alcool mais qui dépasseront donc cette nouvelle limite… 

« Je constate qu’à de très rares exceptions près, les mesures annoncées ne font que renforcer la répression. Or nous savons désormais que cette politique visant à sanctionner les conducteurs, pour ne pas dire les ponctionner, a atteint ses limites. Interdire les vitres teintées ou uniformiser la taille et le format des plaques d’immatriculation des deux-roues motorisés, cela permettra selon le ministre de "faciliter les contrôles". Autant dire que cela facilitera surtout la perception des amendes…

« Et que penser du déploiement de radars feux rouges supplémentaires, en leur associant systématiquement un module de contrôle de la vitesse, et de la modernisation des 4 200 radars par la mise en place de radars « double face » dont il faut souligner au passage le coût prohibitif : 200 000 euros par machine ?

« Encore une fois, à quelques très rares exceptions près, aucune de ces nouvelles dispositions n’est à la hauteur d’une politique efficace en matière de sécurité routière où le terme de "prévention" n’apparaît finalement que dans le titre de ces mesures.

« Ce ne sont pas l’ajout de panneaux réfléchissants pour éviter les contresens sur les autoroutes ou l’interdiction de stationner à moins de 5 mètres d’un passage piétons qui permettront véritablement de réduire le nombre de tués sur nos routes. D’ailleurs, combien de places de stationnement cela va-t-il faire disparaître dans nos communes où les habitants peinent déjà à stationner ?

« À cet égard, comment ne pas être étonné par les mesures concernant  l’amélioration de la sécurité des véhicules et des infrastructures ? Elles sont au nombre de 3 seulement : réduire les risques de contresens sur autoroute ; soutenir les démarches européennes sur l’installation d’enregistreurs de données de la route, c'est-à-dire des boîtes noires dans les véhicules qui seront évidemment utilisées à terme lors de simples contrôles routiers ; fournir aux collectivités locales des guides techniques pour les encourager à réaliser des audits de sécurité.

« Il n’y a donc rien de prévu pour améliorer et entretenir les routes, et plus particulièrement celles du réseau secondaire. Il n’y a rien non plus pour faire disparaître les obstacles fixes (glissières, murs, poteaux, arbres,…) alors qu’il s’agit d’un facteur présent pour les accidents occasionnant 43 % des tués !

« Nous avons échappé à la réduction unilatérale de la vitesse de 90 à 80 km/h... mais pour combien de temps encore ?

« Ainsi, la politique du tout répressif n’a pas dit son dernier mot. Elle va engendrer encore plus de suppressions de points et de drames chez celles et ceux qui perdront leurs permis pour une succession de petites fautes, elle continue à exaspérer les Françaises et les Français qui ne voient dans la sécurité routière qu’une possibilité de plus de les ponctionner. 

« Pourtant, tant d’autres pistes pour réduire la mortalité et les accidents sur nos routes n’ont été explorées, à commencer par la prévention, l’état des routes et la lutte contre les comportements dangereux. Pour ces derniers, il y a déjà suffisamment de règles… qu’il suffirait juste de faire respecter. »


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