Le projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public de transport, examiné au cours de la session extraordinaire selon la procédure d'urgence, est la traduction législative d'un des principaux engagements du Président de la République.

Ce projet, adopté par l'Assemblée nationale le 2 août 2007, vise à renforcer le dialogue social et à fixer un cadre pour l'organisation du service en cas de grève.

Cette réforme poursuit quatre objectifs majeurs :

· Concilier le droit de grève avec la liberté de travailler et la continuité du service public, qui sont des principes à valeur constitutionnelle, et devra s'appliquer au 1er janvier 2008.

· Renforcer le dialogue social en amont des conflits

-         Le projet de loi repose sur l'idée qu'en renforçant le dialogue social dans les entreprises de transport, les grèves pourront être pour une large part évitées.

-         L'objectif est de faire en sorte que, comme dans beaucoup pays, la négociation précède l'action, et non l'inverse. Trop souvent en France, on fait grève d'abord et on discute ensuite : 84% des préavis déposés en 2006 à la SNCF n'ont pas été précédés d'une demande de concertation.

· Préparation des modalités d'organisation du service en cas de perturbation

-         Dans le même temps, le projet fixe le cadre dans lequel le service de transport public doit être organisé en cas de grève.

-         L'objectif est d'assurer aux usagers des transports terrestres, en cas de grève, un service réduit mais prévisible.

· Droit des usagers à être préalablement informés

-         Le droit à l'information des usagers est une priorité en cas de grève ou de perturbation prévisibles

-         Tous les moyens doivent être mis en œuvre pour permettre aux usagers de s'organiser


Le Sénat qui a achevé la discussion du texte le 19 juillet a fait évoluer le texte :

· En définissant ce qu'on entend par « perturbations prévisibles » ;

· En rendant obligatoire des négociations au niveau de la branche ;

· En renforçant la garantie d'un service les jours d'examen nationaux ;

· En précisant la computation du délai de 48 heures,

· En créant la possibilité de faire appel dès le début du conflit à l'intervention d'un médiateur ;

· En prévoyant que la consultation sur la poursuite de la grève peut être initié par l'une des parties au conflit et/ou le médiateur lui-même ;

· En définissant les conditions de remboursement des usagers et l'articulation de se remboursement avec d'éventuelles pénalités prévues par la convention entre l'AOT et l'entreprise de transport pour éviter l'effet « double peine » ;

· En rendant effectif le non paiement des jours de grève ;

· En instaurant un bilan qui devra examiner l'opportunité d'extension à d'autres moyens de transports ;

· En créant une obligation pour les AOT de prévoir des critères de qualité de service dans les conventions passées avec les entreprises de transport (service sociaux et environnementaux).

 


 

PRINCIPALES DISPOSITIONS DU TEXTE

1) Champ d'application

Article 1

Ø      Dans le Titre 1er, l'article 1 du projet de loi-cadre définit les notions d'entreprise de transport et d'autorité organisatrice de transport auxquelles s'applique le texte :

-         On entend par entreprise de transport « toute entreprise, dotée ou non de la personnalité morale, chargée d'une mission de service public de transport ferroviaire de voyageurs ou d'une mission de service public de transport terrestre régulier de personnes à vocation non touristique ».

-         On entend par autorité organisatrice de transport « toute collectivité publique, groupement de collectivités ou établissement public compétent pour l'institution et l'organisation d'un service public de transport ferroviaire de voyageurs ou d'un service public de transport terrestre régulier de personnes à vocation non touristique » y compris le Syndicat des transports d'Ile-de-France et les autorités organisatrices de proximité.

Ø      Le Sénat a réintroduit dans cet article les principes constitutionnels de la liberté d'aller et venir, d'accès au service public, la liberté du travail et la liberté du commerce et de l'industrie qui était initialement situé dans l'article 4 du projet.

2) Dialogue social et prévention des conflits

Le Titre II du projet de loi-cadre porte sur le dialogue social et prévention des conflits dans les entreprises de transport.


Article 2 : Obligation de négocier dans les entreprises de transport avant toute grève

Ø      L'article 2 prévoit que les entreprises et les syndicats ont jusqu'au 1er janvier 2008 pour trouver un « accord cadre » organisant une procédure de prévention des conflits et tendant à développer le dialogue social. Dans ces entreprises, le dépôt d'un préavis de grève ne peut intervenir qu'après une négociation préalable entre les organisations syndicales représentatives et l'entreprise.

Ø      Le Sénat a précisé que cette négociation préalable se tiendrait avec les organisations représentatives qui envisagent de déposer un préavis, ce afin que dans les entreprises dont les activités sont multiples, des organisations qui ne seraient pas directement concernées par le conflit, soient obligatoirement convoquées.

Ø      Le Sénat a rendu obligatoire les négociations au niveau de la branche alors que le texte initial n'en n'ouvrait que la possibilité.

Ø      Ces accords de branche s'appliquent dans les entreprises de transport où aucun accord cadre n'a pu être signé. Faute d'accord, un décret en Conseil d'Etat fixera les règles d'organisation et de déroulement de la négociation préalable.

Ø      L'article 2 prévoit que l'accord-cadre devra notamment préciser :

-         les conditions dans lesquelles une organisation syndicale représentative notifie à l'entreprise les motifs pour lesquels elle envisage de déposer un préavis ;

-         le délai dans lequel l'entreprise est tenue de réunir les organisations syndicales représentatives (3 jours maximum) ;

-         la durée dont l'entreprise et les organisations syndicales représentatives disposent pour conduire la négociation préalable (10 jours maximum) ;

-         les informations qui doivent être transmises par l'entreprise aux organisations syndicales représentatives ainsi que le délai ;

-         les conditions dans lesquelles la négociation préalable se déroule ;

-         les modalités d'élaboration du relevé de conclusions de la négociation préalable

-         les conditions dans lesquelles les salariés sont informés des motifs du conflit, de la position de l'entreprise, de la position des organisations syndicales représentatives ainsi que des conditions de leur information.  

Ø      Le Sénat a précisé que les accords cadres signés avant l'entrée en vigueur de la loi demeurent applicables jusqu'à la conclusion de nouveaux accords, tout en fixant une date butoir afin que des entreprises ne se soustraient pas ad vitam aux dispositions légales. Ainsi, la RATP et la SNCF devront adopter un nouvel accord de prévention des conflits pour le 1er janvier 2009.


Article 3 : Fin de la pratique dite des « préavis glissants »

L'article 3 met fin à la pratique dite des « préavis glissants » permettant le dépôt d'un préavis de grève avant l'échéance du précédent. Il prévoit que lorsqu'un préavis est déposé, un nouveau préavis ne peut être déposé par le ou les mêmes organisations avant l'échéance du préavis en cours.

3) Organisation de la continuité du service public

 

Le Titre III du projet de loi-cadre porte sur l'organisation de la continuité du service public dans les entreprises de transport en cas de grève ou autre perturbation du trafic.

Article 4

Dessertes prioritaires

Ø      L'autorité organisatrice de transport (AOT) définit les dessertes qui doivent être prioritairement assurées en cas de perturbations prévisibles.

Précisions sur la notion de « perturbations prévisibles »

Ø      La commission spéciale du Sénat a souhaité apporter des précisions  à la notion qu'elle estimait vague de « perturbations prévisibles » et a considéré que sont réputées comme telles les perturbations qui résultent :

  • de grèves ;
  • d'incidents techniques, dès lors qu'un délai de trente-six heures s'est écoulé depuis leur survenance ;
  • d'aléas climatiques, dès lors qu'un délai de trente-six heures s'est écoulé depuis le déclenchement d'une alerte météorologique. L'entreprise devant être en mesure d'anticiper les difficultés et d'en informer les usagers, au vu des prévisions.
  • plus généralement, de tout événement dont l'existence a été portée à la connaissance de l'entreprise de transport par les services de l'Etat, par l'AOT ou par le gestionnaire de l'infrastructure depuis trente-six heures.

Plan de transport adapté et plan d'information des usagers.

Ø      Pour assurer les dessertes prioritaires l'AOT doit définir différents niveau de service : pour chaque niveau de service elle fixe les fréquences et plages horaires.

Ø      Le niveau minimal doit permettre d'éviter que soit portée une atteinte disproportionnée aux libertés et correspond à la couverture des besoins essentiels. 

Ø      Le Sénat a ajouté la nécessité de garantir l'accès au service public d'enseignement les jours d'examens nationaux, c'est-à-dire du brevet national du collège d'une part, du baccalauréat.

Ø      Sur la base de ces priorités, les entreprises de transport élaborent un plan de transport adapté et un plan d'information des usagers et soumettent des plans aux AOT. Le plan de transport adapté indique les niveaux de service à assurer en fonction des effectifs et des moyens disponibles. 

Ø      Les conventions d'exploitation conclues par les AOT et les entreprises de transport avant l'entrée en vigueur de la loi comportent un plan de transport adapté et un plan d'information des usagers. Les conventions d'exploitation en cours sont modifiées avant le 1er janvier 2008.

Ø      Enfin le préfet est informé aux différents stades du processus d'élaboration de ces plans et il se substitue à l'AOT en cas de carence, non seulement pour définir les dessertes prioritaires mais aussi pour approuver les propositions de l'entreprise de transport.


Article 5

Des négociations sur la prévisibilité du service

Ø      L'article 5 prévoit que les entreprises de transport et les organisations syndicales représentatives engagent des négociations en vue de la signature avant le 1er janvier 2008 d'un accord collectif de prévisibilité du service applicable en cas de grève.

Ø      Cet accord recense par métiers, par fonctions et niveau de compétence ou de qualification, les effectifs et les moyens matériels indispensables à l'exécution du plan de transport. Des personnels non grévistes peuvent être réaffectés sur des lignes affectées par la grève.

L'obligation pour les salariés d'informer 48 heures avant le début de la grève de leur intention de se mettre en grève.

Ø      Les salariés concernés par l'offre de service doivent informer l'entreprise au plus tard 48 heures avant le début de la grève, de leur intention ou non de se joindre au mouvement sous peine de sanction disciplinaire.

Ø      Le Sénat a précisé que la déclaration d'intention de grève doit être faite quarante-huit heures avant le moment mentionné dans le préavis pour le début de la grève, ce qui pouvait certes se déduire de la rédaction initiale, mais qui pouvait être rédigé de manière plus explicite suivant l'appréciation de la commission spéciale.

Article 6

Médiation

Le sénat a introduit la possibilité pour les parties, dès le début du conflit, de désigner un médiateur d'un commun accord.

Consultation à bulletin secret

Ø      Au bout de huit jours de grève, une consultation peut être organisée à la demande de l'entreprise, de toute organisation syndicale représentative ou du médiateur. Elle est assurée dans des conditions garantissant le secret du vote, l'inspecteur du travail en est informé.

Ø      La commission du Sénat a souhaité préciser que l'organisation de la consultation doit être de droit lorsqu'elle est demandée par un syndicat représentatif dans l'entreprise. La rédaction initiale semblant indiquer que la décision d'organiser la consultation était laissée à la seule discrétion du chef d'entreprise.


Article 7

Droit à une information précise et fiable pour les usagers

Ø      Tout usager du service de transport a le droit de disposer, en cas de perturbation du trafic, d'une « information précise et fiable sur le service assuré ».

Ø      Elle doit être assurée au plus tard vingt-quatre heures avant le début de la perturbation ou de la grève.

Bilan annuel

Après l'article 7, le Sénat a fait ajouter un article 7 bis dans lequel l'entreprise organisatrice de transport établit et communique un bilan annuel détaillé de l'exécution du plan de transport.

Article 8

Modalités de remboursement des titres de transport aux usagers

Ø      Le Sénat a profondément remanié cet article et il est prévu directement par l'article que les entreprises de transport, quand elles sont directement responsable des perturbations, sont tenues de rembourser les usagers ( ce qui exclut les cas de force majeure tels que des dépôts bloqués ou des violences urbaines...)

Ø      Toutefois, vu les difficultés opérationnelles que ce droit à remboursement entraîne, la loi prévoie que les modalités pratiques sont prévues par les conventions conclues entre les AOT et les entreprises de transport, prolongation d'abonnement ou du remboursement, afin de prendre en compte les spécificités de chaque réseau.

Articulation d'éventuelles pénalités

Afin d'éviter un effet « double peine » si des indemnités sont prévues par l'AOT pour non respect du plan de transport, elles sont adaptées pour permettre le financement de ces remboursements.

Article 9  Non-paiement des jours de grève

Le principe de non-paiement des jours de grève pré-existait dans la loi, l'article 9 le complète en ajoutant que les sommes qui pourraient être versées par ailleurs et qui pourraient avoir pour effet directement ou directement de compenser ces retenues sont « sans cause ».

Article 10 (nouveau) : Bilan et extension du dispositif

Par un article additionnel, le Sénat crée un rapport d'évaluation de la mise en oeuvre de ce projet de loi. Le rapport devra examiner l'opportunité d'étendre à d'autres types de transports publics de voyageurs.

Article 11 (nouveau)

Les autorités organisatrices de transport doivent inclure dans les conventions avec les entreprises de transport des critères de qualité de service.

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